Christian Renonciat
"Du bout des doigts" 50 ans de sculpture
La Bâche dodo 1 s'associe à sa quasi jumelle la Bâche dodo 2 pour composer, avec la Bâche Dodo 3, je ne sais quel ironique et provisoire triptyque, ouvrant dans la linéarité de notre présent une brèche du temps passé, l'époque où l'art visait à désigner et dévoiler les mystères religieux. C'est que, manipulant des objets ordinaires de notre monde actuel, le cageot, la feuille de papier, l'emballage de carton papier et choisissant «des sujets aussi dérisoires en apparence», Christian Renonciat révèle, dans ce que je nommerais ses «sourires sculptés», que la matière des choses n'est pas ce que l'on croit. Il se joue de notre jugement et de notre regard, sans nous tromper au juste car nous savons pertinemment qu'il est le maître des matières, des apparences, des surfaces, du grain du bois, trop poli pour être malhonnête. Dans ses jeux de main et de regard, Christian Renonciat atteint ainsi, sans avoir l'air d'y toucher, les grands sujets de la métaphysique tout en étant le simple artisan d'un artifex, un créateur d'artifices. Comme le héros de la peinture romantique allemande Caspar David Friedrich, on l'entend presque nous confier à mi-voix: «Il se peut que l'art soit un jeu. Mais c'est un jeu sérieux».
Paul-Louis Rinuy
(extrait du texte du catalogue « Du bout des doigts »)